Scandaleux mensonge du titre du film : la vallée n'était pas verte.
Comme je le dis ci-dessus, je suis un inculte. J'entends par là que ma culture cinématographique n'est pas celle, chronologique et classique, enseignée dans les facs, par exemple. Je découvre au gré de mes envies, et donc sans logique particulière. De fait, il me semble que plus je découvre, et plus je remonte le temps, découvrant les classiques fondateurs après les œuvres qui en découlent.
C'est ainsi qu'ayant été subjugué par la manière qu'avait Michael Cimino de faire vivre au spectateur la vie d'une communauté, je découvre ce superbe film de Ford, certainement une immense inspiration pour l'auteur de Voyage au bout de l'enfer et la Porte du Paradis.
Dans ce film, John Ford raconte la vie d'une famille de mineurs gallois au XIXè siècle, et à travers elle, la vie d'un petit village confronté à l'industrialisation.
Les montées et descentes de ce chemin qui mène à la mine rythment le film
C'est par les chants et les fêtes que le spectateur se retrouve immergé dans cette communauté. Les chants touchent en plein cœur, comme lors de ce retour joyeux de la mine en début de film, décrivant un monde dans lequel tout le monde trime, mais tout le monde a à manger. Toute cette première partie est tout simplement magnifique, on a véritablement l'impression de faire partie de ce village, tant les détails fourmillent qui rendent réel ce qui est à l'écran.
Mais le titre du film nous prévient : ce qui nous est présenté comme un Eden, à travers les yeux du narrateur, est déjà mort, fait déjà partie du passé. Ce qui charge chaque plan d'une intensité ambiguë, les moments heureux étant déjà des souvenirs.
C'est particulièrement évident lorsque la famille reçoit une lettre de la Reine qui convie son fils à chanter devant elle. Le père lance alors, exalté, les préparatifs d'une grande fête. Au moment où il se réjouit de la grande fête de départ qu'il fera pour ses fils et au sommet de sa joie, il se rend compte que ses enfants vont partir et la séquence se charge soudain d'une grande gravité.
La mère et le fils, à gauche, réalisent avant le père le sens de cette fête
Un autre élément intéressant à mon sens est la place de l'Eglise dans la vision de Ford. S'il présente la Foi au sens large comme un ciment de cette communauté, et un moyen d'avancer (au sens propre via le personnage principal!), il condamne l'institution religieuse et le fanatisme avec force.
Je n'en ai pas parlé, mais techniquement le film est un sans-faute : très beau noir et blanc, belle musique, et surtout un découpage et un montage quasiment invisibles. Grand film, quoi.