Le Cinéma de mon père, film1 : L'Evadé d'Alcatraz

En hommage à mon père, j'inaugure un nouveau type d'articles sur des films qu'il aimait, ou qui me font penser à lui. On commence avec un excellent Don Siegel !

L'Evadé d'Alcatraz, Don Siegel, 1979.


Ce film est un véritable souvenir de famille. Nous l'avions regardé ensemble, en VF, et une de ses répliques était devenue rituelle (pas la meilleure !) : "C'est parce que t'es con, Morris", réplique qui a longtemps été mon unique réponse au moindre "Pourquoi ?" familial.

Pourquoi mon père l'aimait-il tant ? - "Parce que t'es con, Morris". En fait, je crois qu'il a toujours bien aimé les films de prison, peut-être parce que son père avait été prisonnier pendant la guerre. J'aurais d'ailleurs pu choisir "La Grande Évasion", avec Steve Mc Queen, qu'il adorait aussi, mais je le connais moins. Je pense que dans ces films, c'est plus le ressort dramatique de la lutte contre l'injustice que celui de la lutte pour la liberté qui le fascinait (même si, en fait, c'est lié). Ses rares et saines colères s'exprimaient lorsqu'il ressentait ce sentiment d'injustice.

Dans l'Evadé d'Alcatraz en particulier, c'est un directeur de prison sadique qui incarne cette injustice, comme un symbole du système carcéral en général, impitoyable, à l'image du mythe Alcatraz.

Faire jouer le rôle du directeur de prison à l'interprète du "Prisonnier", hihihi.
Evidemment, la fascination pour le film passe aussi par Eastwood. Son interprétation de Morris, son calme, son avarice de mots, sa résistance à l'autorité, son respect pour ses camarades suscitait forcément plus l'admiration de mon père que celle de Dirty Harry ou du personnage de la trilogie du Dollar : plus bavards, plus cyniques, plus individualistes : ils lui ressemblaient moins. 

Et puis il y a la mise en scène de Don Siegel, qui, lorsqu'on revoit le film, frappe par sa précision, sa sécheresse, son absence de chichis. Elle se marie de superbe manière avec le mutisme de Morris dans sa longue ouverture muette, magnifique séquence qui en quelques minutes, avare d'effets mais toujours percutante, est d'une puissance narrative folle et exploite à merveille le décor incroyable qu'offre le rocher : le film y est en bonne partie filmé, ou reproduit (Visiter Alcatraz, c'est d'ailleurs replonger dans le film - l'histoire de Morris y est racontée).

"Porter un bonnet ? Tu me prends pour qui, connard? Un des sept nains ?"
Peu de mots, peu d'effets de manche, mais de l'action, en accord avec des convictions : ce film ne pouvait que plaire à mon père. Et il me plaît beaucoup aussi !

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